Ateliers de l’ABC-IDF au week-end Antirep (juin 2019)

Les 01 et 02 juin 2019, l’ABC-IDF a pu participer au week-end d’échanges et d’autoformation contre la répression, organisé par la Coordination contre la répression et les violences policières (IDF).

Nous y avons proposé les activités suivantes : atelier d’écriture anti-carcérale, atelier d’autodéfense numérique, point d’information sur le stress post-traumatique, discussion anti-carcérale. Cette dernière activité a été organisée en collaboration avec d’autres personnes.

Ci-dessous, les bilans de ces différentes activités avec des perspectives pour l’avenir. Ce week-end a été la première occasion d’activité publique de l’ABC-IDF, et nous sommes heureux.ses d’avoir pu partager ces moments ensemble.

Atelier d’écriture anti-carcérale

Nous avons tenu un atelier d’écriture à destination des personnes incarcérées, en fil continu pendant tout le festival. Etaient mis à disposition du matériel nécessaire à l’écriture (stylos, feutres, papiers, timbres, enveloppes, etc.), des adresses de personnes incarcérées, mais également de la documentation sur l’écriture aux détenu.es (voir sur ce blog “Ecriture anti-carcérale”, dans l’onglet “Anti-carcéral”). Deux moments de discussion collective autour de l’écriture aux détenu.es (conseils, avertissements, seggestions) étaient prévus. Un atelier de calligraphie était organisé le samedi après-midi.

Ce qui a fonctionné :

  • Des participant.es au festival se sont montré.es très intéressé.es et reconnaissant.es de l’existence d’un tel atelier. Nous-mêmes avons pris beaucoup de plaisir à développer cette pratique, tenir cet atelier, rencontrer des gens et aborder le milieu carcéral par ce biais. Nous avons apprécié que plusieurs personnes choississent de passer beaucoup de temps à cet atelier ce qui nous a permis de nous rencontrer et d’échanger autour de lettres.
  • Nous avons pu récolter un nombre non négligeable de lettres.
  • Deux pratiques ont été positives pendant l’atelier, dans le sens où elles ont permis de rendre plus accessible le geste d’écriture : l’écriture à plusieurs mains (cadavre exquis, écriture de petits mots sur des posters ayant circulé pendant le festival), l’atelier de calligraphie.

Ce qui a moins fonctionné :

  • Nous avons toutefois pu constater une réticence vis-à-vis de la pratique de la correspondance (et pas uniquement aux prisonnier.es). Le fait de s’adresser à des personnes que l’on ne connait pas forcément accentue la difficulté inhérente à une pratique qui pour certain.es est inédite. Beaucoup avouent que l’écriture aux prisonnier.es n’est pas un geste militant ordinaire et habituel.
  • Une barrière de plus à l’écriture de lettres aux détenu.es est la question de la confidentialité : nous n’avons pas pu assurer les moments de discussion collective prévus, et la documentation disponible n’a pas suffi à rendre clair ce qui peut être dit et comment.

Nous en sommes venu.es à la conclusion qu’il y avait un gros travail à faire pour partager et généraliser cette pratique de solidarité et en faire une habitude militante.

Quelques perspectives :

  • D’une part, une écriture collective rapide, ne nécessitant pas trop d’investissement, de calme ni de concentration, comme remplir le dos d’un poster à plusieurs ou bien compléter une carte postale. Ce genre de pratiques nous paraît adapté aux évènements publics (comme par exemple des festivals ou des soirées de soutien). Ce type d’écriture “rapide” n’est pas à sous-estimer, elle colore très agréablement le quotidien des détenu.es d’une tonalité militante.
  • D’autre part, une écriture plus régulière et approfondie, qui ne peut se faire que dans un cadre calme et sécurisé, avec du temps devant soi et de la documentation.
  • Enfin, il nous semble important de prévoir des moments de discussion collective en amont de l’écriture pour clarifier les contraintes et les possibilités.

Nous proposerons donc des ateliers d’écriture régulièrement, où nous tâcherons de mettre en place ces conditions.

Atelier d’autodéfense numérique

L’atelier d’autodéfense numérique a été organisé en deux volets : (1) un espace d’information composé de six posters géants sur la sécurité numérique, chaque poster couvrant une thématique spécifique, (2) une Install Party (assurée par l’association La Librerie). Nous nous sommes rendu.es disponibles tout le long du festival pour échanger sur la sécurité numérique. Les posters ont été consultés par un grand nombre de personnes, les retours ont tous été très positifs. L’Install Party a également amené du monde et satisfait les attentes. Nous avons enfin eu le plaisir de discuter à plusieurs reprises dans la bonne humeur sur un sujet parfois perçu comme aride 😉 .

Point d’information sur le stress post-traumatique

Nous avons organisé un espace avec une documentation en consultation libre sur le stress post-traumatique : critères diagnostiques, différences entre les personnes, solutions et prévention, etc. Ce point a été l’occasion d’échanges et de rencontres avec des perspectives de collaboration pour le soutien aux victimes de violences politiques (agression par la flicaille, détention, etc.). Nous notons toutefois que ce point a essentiellement suscité l’intérêt de personnes déjà sensibilisées à la question du stress post-traumatique chez les activistes.

Discussion anti-carcérale

Bilan collectif de personnes ayant participé à l’organisation de l’atelier, qu’elles participent ou non à l’ABC-IDF.

Quatre thèmes étaient annoncés pour cette discussion : (1) la détention du point de vue des personnes incarcérées (étapes de la détention, organisation de la vie en taule, relations avec les autres détenu.es, rapport à l’administration pénitentiaire et aux matons, etc.), (2) la détention du point de vue des proches de personnes incarcérées (parloirs, courrier, soutiens, etc), (3) la survie psychologique en prison (ce qui est le plus éprouvant, ce qui permet de conserver un équilibre, etc.), (4) la cavale (modalités, exemples, conditions de possibilité, etc.)

Ce programme, ambitieux pour le temps imparti (3 heures), a été partiellement remodelé par la libre circulation de la parole lors de l’atelier, et c’est tant mieux. Des sujets ont été abordés et ont été développés, auxquels nous n’avions pas pensé (comme la sexualité). Par ailleurs, la parole sur d’autres lieux d’enfermement (psychiatrie et CRA) a trouvé une place. Nous souhaitons d’ailleurs remercier les personnes organisant les ateliers suivants, qui ont bien voulu décaler le début de leurs ateliers de 15 minutes pour nous laisser le temps de finir cette discussion tranquillement. Le revers de la médaille est que, malgré cela, des thèmes annoncés n’ont pu être suffisamment développés : celui de la cavale et celui des proches.

Les échanges ont été riches et l’ambiance très positive. Le thème général étant sombre, ce fut une agréable surprise. La réunion de personnes avec et sans expérience de la détention a permi de développer une discussion spontannée et stimulante, où la parole circulait librement et où se mêlaient le factuel et le ressenti. Une affinité et une confiance partagées ont permi aux personnes ayant une expérience carcérale de répondre à de nombreuses interrogations et d’enrichir significativement notre compréhension collective de la taule. Une ambiance de partage et de bienveillance a permi à chacun.e de s’exprimer sans craindre ou faire l’expérience d’un quelconque jugement. C’est du moins le ressenti des auteur.es de ces lignes, et nous espérons qu’il en est de même pour tout.es les autres participant.es.

La grande qualité des échanges et les rencontres nous donnent l’envie de renouveller cette expérience, et éventuellement de mettre en place un cycle de rencontres/discussions sur l’expérience carcérale et les résistances à la taule.

On vous donne bientôt des nouvelles sur le blog de l’ABC-IDF !